Bonne nouvelle : la gestion des talents se généralise. Elle s’affiche dans près de 64% des entreprises françaises, selon le dernier baromètre ANDRH-Féfaur-Cornerstone. En revanche, elle ne privilégie pas tous les salariés et se heurte encore à un manque de moyens, alors même que son impact sur la performance économique est reconnu.
Réalisé fin 2016 auprès de 537 professionnels des RH, le 3ème baromètre sur la gestion des talents de l’ANDRH, du cabinet Féfaur et de l’éditeur de logiciel Cornestone onDemand, révèle en quelques chiffres la démocratisation de cette politique dans les entreprises.
Près de deux tiers d’entre elles l’ont mise en œuvre dont 36,5% depuis plus de 3 ans. Plus des trois quart l’appliquent à toutes leurs activités, 44,7% à l’ensemble de leurs salariés (contre 40,5% en 2015) et même si 36% s’affirment « réfractaires », c’est tout de même mieux que lors du précédent baromètre où 4 entreprises sur 10 étaient dans ce cas.
Une gestion des talents trop élitiste
Pour autant, cet investissement ne concerne pas tout le personnel. Les entreprises prennent d’abord soin de leurs hauts potentiels (56,5%) et de leurs cadres dirigeants (48%). « Ces taux disent la valeur [qu’elles] accordent à la fidélisation de leurs dirigeants et au développement de hauts potentiels souvent destinés à prendre un jour les rênes » précisent les auteurs de l’étude.
Elles ne sont ensuite que 27,8% à valoriser les managers de proximité, malgré son rôle reconnu d’interface relationnelle et culturelle. « Il y a ici un signal d’alerte pour les RH et une urgence à moderniser la prise en compte des ‘n+1’ pour améliorer la rétention et l’engagement. »
Dans les entreprises qui déclarent ne pas appliquer la gestion des talents à toutes leurs activités, priorité est donnée aux métiers du commerce (14,8%) et à la direction générale (12,7%). « Les activités commerciales, fer de lance de l’entreprise sur ses marchés, sont confrontées à une pénurie des profils commerciaux, managers ou collaborateurs à laquelle la gestion des talents peut répondre en partie. » La R&D n’est concernée que dans 10% des cas. Un résultat surprenant alors que l’innovation est considérée comme un levier concurrentiel.
Soft skills : « Le talent doit jouer collectif »
Pour près de 9 entreprises sur 10, un talent a forcément le sens des responsabilités. Il sait aussi s’adapter, faire preuve d’un engagement fort, être performant sur le plan opérationnel et développer les compétences de ses équipes. Par contre, il est moins souhaitable qu’il soit ambitieux. Le talent doit jouer collectif… « On peut constater que ce portrait-robot correspond bien à celui d’un manager de proximité. Il est donc étonnant que ceux-ci ne bénéficient pas plus d’une politique de gestion des talents » précisent les auteurs de l’enquête.
Pour développer les talents, 90% des entreprises parient d’abord sur la formation présentielle, puis sur des modes de fonctionnement plus collaboratifs que sont les projets et les missions transverses. Viennent ensuite les apprentissages informels comme le coaching et le mentoring. Le e-learning, cité par près de la moitié des entreprises, est en progression (26% en 2015).
Certaines se tournent vers des pratiques RH plus innovantes, comme la collaboration et les communautés de pratiques (44%). « Il semble que les organisations hiérarchisées soit progressivement remplacées par des modes plus souples, agiles, collaboratifs, à même de tirer tout le parti de l’intelligence collective » indique Michel Diaz, directeur associé de Féfaur. 7,5% des entreprises (en particulier les plus grandes) utilisent le big data et les algorithmes prédictifs, 5% impliquent les collaborateurs en freelance.
La gestion des talents, un investissement rentable
L’entretien annuel reste cependant le meilleur outil pour évaluer les talents. Près de 9 entreprises sur 10 le mettent en pratique. On y discute de performance, de compétences, de carrières, de savoir-être, d’objectifs… mais pas de rémunération.
Dans l’ensemble, gérer des talents s’avère payant. Près de 60% des entreprises constatent un meilleur engagement des collaborateurs, une meilleure adéquation des compétences aux besoins futurs de l’entreprise et aux exigences du poste. La prise de poste s’en trouve accélérée, les coûts de recrutement et le turn-over se réduisent, la performance économique des entreprises s’améliore. 56% d’entre elles ayant le plus fort taux de croissance appliquent cette stratégie à toutes leurs catégories de personnel. « La gestion des talents n’est pas un supplément d’âme, mais bien un investissement rentable » affirme Jean-Paul Charlez, président de l’ANDRH.
Le manque de moyens comme frein
Il n’en reste pas moins qu’un certain nombre d’obstacles ralentissent encore sa mise en place. « Ce ne sont plus tant les résistances culturelles ou le manque d’implication du top management qui constituent les principaux freins (…), mais le manque de moyens : budget, outils, ressources humaines » énumère Michel Diaz.
Les entreprises ne sont pas dotées structurellement d’un budget dédié au développement des talents (hors activités formation). Seules 2,7% d’entre elles y consacrent plus de la moitié de leur temps et près de 40% n’utilisent aucun logiciel spécifique. « Il semblerait que RH comme directions générales n’aient pas encore connaissance de tous les outils (…) ce qui pourtant les aiderait à mieux cerner les actions à mettre en œuvre » estime Vincent Belliveau, vice-président exécutif et directeur général EMEA, chez Cornerstone OnDemand.
Source : http://www.focusrh.com / Corinne Dillenseger