Alors que Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée en charge des personnes handicapées, déclarait encore le 18 novembre (1) que « La formation des personnes handicapées est un objectif majeur », le ministère de la Défense, tutelle des Ecoles de Reconversion Professionnelle pour personnes en situation de handicap, s’apprête à se désengager de sa mission et se séparer de ses 9 structures d’accueil.
Les personnels et usagers des ERP ont manifesté dans plusieurs villes de France le samedi 23 novembre, dont Limoges (2) et Toulouse (3).
A Bordeaux (4), le mouvement était animé par le collectif Sauvons Les Erp et l’association des Amis et Usagers de l’ERP (LAUdeLERP), qui ont été reçus par M. Bédécarrax, Secrétaire général de la Préfecture de la Gironde. Le mot d’ordre : rester un service public !
15 000 bénéficiaires
Depuis plus d’un siècle, les Ecoles de Reconversion Professionnelle de l’ONACVG (Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre) œuvrent pour la reconversion des personnes en situation de handicap, autrefois les mutilés de guerre, aujourd’hui les Travailleurs Handicapés.
Ces établissements publics, au nombre de neuf répartis sur le territoire national, travaillent avec les Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH) à la reconversion et à l’insertion professionnelle des Travailleurs Handicapés et sont les seules à leur offrir des formations diplômantes de l’Education natio- nale (du BEP au BTS).
Plus de 15 000 personnes ont déjà bénéficié de ce service public. Seule condition d’accès : avoir la Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH).
90% de réussite au bac
Le Gouvernement prépare un volet « Handicap » dans le cadre de sa réforme de la formation professionnelle. En effet, les personnes handicapées sont deux fois plus au chômage que les autres personnes. Peut-être est-ce dû au fait que 77% des personnes handicapées n’ont pas le bac.
Les taux de réussite des ERP au baccalauréat professionnel dépassent régulièrement, toutes filières con- fondues, les 90% , avec un taux d’insertion professionnelle avoisinant les 70%. De nombreux stagiaires ont ainsi accès à une poursuite d’étude, notamment en BTS en contrat de professionnalisation, véritable vecteur d’emploi.
A côté de ces chiffres, les ERP permettent aussi à leurs usagers, pendant 2 ans, de travailler à leur projet professionnel, de recouvrer leur estime de soi après un accident de la vie, d’envisager un avenir en milieu ordinaire.
Les handicapés sacrifiés sur l’autel de la rentabilité ?
Dans le cadre de la loi de modernisation de l’action publique, les ERP seraient vendues au privé. Comme les autoroutes et la distribution de l’eau ?
« Qu’en sera-t-il si cette mission dont la rentabilité s’inscrit dans le long terme et l’humain est confiée au secteur privé ? » C’est la question que posent les personnels des ERP et qu’ils ne cessent de poser à leurs instances dirigeantes depuis maintenant 2 ans. Entre effets d’annonce et reports de dates, personnels et usagers ne sont toujours pas rassurés. « Nous ne portons pas de bonnet rouge, nous avons choisi la voie de la démocratie et du dialogue et on nous oppose au mieux la langue de bois, au pire le mépris, et c’est les handicapés qu’on insulte. » (Collectif Sauvons Les Erp).
A l’heure où il faut trouver de l’argent, peut-être qu’une partie de la réponse réside dans le patrimoine foncier des Ecoles qui attire les convoitises immobilières ? (5) Une recette à court terme au détriment, une fois encore, de l’insertion sociale et professionnelle des personnes en situation de handicap.