Une étude d’économie comportementale menée au sein de l’ESC Dijon montre que notre comportement est conditionné par nos représentations mentales des hommes politiques

Dijon, mai 2014. Une récente étude menée au sein du LESSAC (Laboratoire d’Expérimentation en Sciences Sociales et Analyse des Comportements) du Groupe ESC Dijon-Bourgogne met en évidence la conséquence du comportement des hommes politiques sur celui de leurs concitoyens. A l’heure où l’image que les Français ont de leurs représentants politiques s’avère désastreuse, voilà une donnée que ces derniers auraient tout intérêt à prendre plus en compte. Découvrez ici quelques éléments de cette étude dirigée par Jérémy Celse.

Association et comportement

Des scientifiques ont mis en évidence le principe de l’amorçage conceptuel. Cette technique, utilisée par les chercheurs en sciences comportementales pour mesurer les attitudes des individus, montre que l’activation d’une représentation mentale interne peut influencer, dans une période et dans un contexte différent, notre manière de traiter l’information, de percevoir et d’agir.

Par exemple, quand nous amorçons l’image d’une personne âgée, nous l’associons à toutes sortes de valeurs et notions dont la lenteur. Une expérience a ainsi montré que se représenter des personnes âgées avait une incidence directe sur le temps que l’on prenait à réaliser des choses.

Il a aussi été montré qu’en amorçant l’identité de criminels, cela renforce les comportements criminels. Ou que l’amorçage de l’identité professionnelle des banquiers incite à entreprendre des comportements frauduleux. Il en va de même pour les hommes politiques.

Les hommes politiques vus par les Français

Cette association n’est pas sans effet sur notre comportement. Prenons un groupe d’individus et demandons à la moitié d’entre eux de décrire un enseignant et à l’autre moitié un homme politique. En les faisant participer par la suite à une expérience dont le but est d’identifier les comportements malhonnêtes (comme le mensonge), il ressort que les individus à qui l’on a demandé de décrire un enseignant mentent moins que les individus ayant décrit un homme politique.

Si les hommes politiques sont donc considérés par les individus comme étant moins honnêtes que les enseignants, cela se traduit également par une influence sur le comportement malhonnête des individus.

Gauche, Droite : même combat ?

Nous attribuons à nos politiciens des traits malhonnêtes et cette attribution mentale nous pousse inconsciemment à entreprendre également des comportements malhonnêtes. Mais il y a aussi des différences en fonction du candidat politique. L’étude sur plusieurs années du LESSAC a ainsi comparé l’influence des deux derniers Présidents de la République sur les comportements mensongers des individus.

Il en résulte que les comportements malhonnêtes sont étroitement liés à la personne du politique : les participants à qui on a demandé de décrire Nicolas Sarkozy ont ainsi davantage menti que ceux à qui on a demandé de décrire François Hollande. Plus précisément, le rappel des représentations mentales associées à François Hollande augmente les comportements malhonnêtes de 12,71% tandis que le rappel de celles associées à Nicolas Sarkozy augmente les comportements malhonnêtes de 37,29%.

Un amorçage de Nicolas Sarkozy renforce ainsi les comportements malhonnêtes des Français plus fortement qu’un amorçage de François Hollande. Penser à Nicolas Sarkozy nous pousse davantage à mentir que de penser à François Hollande !

Jérémy Celse est économiste et Professeur Associé en Économie Comportementale au sein du Groupe ESC Dijon-Bourgogne. Titulaire d’un doctorat en Sciences Économiques, sa recherche s’articule principalement autour de l’impact des émotions sur la prise de décision. Dans ses activités de recherche, il conduit des expériences à travers la mobilisation des outils de l’Économie Expérimentale.