À l’heure où l’on s’interroge sur la place du dialogue social dans le pacte de responsabilité, rares sont les dirigeants politiques, patronaux et syndicaux à oser clamer haut et fort que les relations sociales sont un puissant levier de performance économique. Les Français, eux, n’ont pas ces réserves. S’ils dénoncent à plus de 80% l’inefficacité des relations sociales actuelles entre syndicats et employeurs, ils sont presque aussi nombreux à considérer, en même temps, que l’instauration d’un dialogue social de qualité serait une arme contre le chômage et pour la croissance.

C’est ce que révèle un sondage[1] réalisé par OpinionWay pour Société en Mouvement, dont les résultats ont été dévoilés le 12 février dernier dans l’enceinte du Conseil économique, social et environnemental parBruno Jeanbart, directeur d’Opinion Way, en présence de Jean-Paul Delevoye, président du CESE, et de Gilles de Robien,ambassadeur chargé de promouvoir la cohésion sociale, délégué du gouvernement français auprès de l’OIT et président de Société en Mouvement[2]. Plusieurs responsables syndicaux (CGT, FO et CFDT), DRH de grands groupes, représentants des écoles de management, économistes et professeurs d’université spécialistes du dialogue social et de la lutte contre les discriminations syndicales ont assisté à cette présentation.

Premier enseignement de ce sondage : Les Français portent un regard sans concession sur les relations actuelles entre syndicats et employeurs. À leurs yeux, celles-ci sont au mieux « sans effet », et au pire elles constituent « un frein » aussi bien en matière de croissance et de performance des entreprises (83 %) que d’emploi (82%) ou d’amélioration des conditions de travail (69%). Autre chiffre révélateur : seuls 5% des sondés estiment que la France offre « le meilleur modèle en matière de relations sociales », tandis que l’Allemagne s’attire les suffrages du plus grand nombre (40% des citations), devant la Suède (25 %).

 

Par ailleurs, les Français identifient mal les missions des syndicats. S’ils citent spontanément comme relevant de leur champ d’action la question des conditions de travail (70%) et celle des évolutions salariales (64%), ils ne sont plus que 45 % à évoquer la formation professionnelle et 41 % l’assurance chômage. Voilà de quoi donner matière à réfléchir aux pouvoirs publics et aux partenaires sociaux, qui viennent juste de parvenir à un accord qualifié d’ « historique » sur la formation professionnelle !

 

Sans illusion sur l’impact des relations actuelles entre syndicats et employeurs, les Français n’en sont pas moins pleins d’espoirs. Ils croient à la puissance du dialogue social et y voient un levier pour développer l’activité économique. 8 1% des sondés estiment qu’un dialogue social de qualité serait un moyen d’améliorer les conditions de travail. Près des trois quarts pensent qu’il contribuerait à la croissance et à la performance des entreprises (74 %) et au développement de l’emploi (72%).

 

En dépit de la mauvaise image dont souffrent les syndicats, près d’un Français sur deux estime également qu’un nombre plus élevé d’adhérents syndicaux aurait un impact positif sur la qualité du dialogue social en France, et plus d’un sur trois pense qu’il améliorerait la performance économique de notre pays.

 

Dans un contexte de crise, le sondage révèle l’émergence d’un consensus, par delà les clivages politiques, pour renforcer les acteurs du dialogue social. Quelles que soient leurs affinités politiques,les Français espèrent un dialogue social de haut niveau, grâce à une meilleure formation des managers aux relations sociales et des syndicats aux enjeux de l’entreprise (opinion de respectivement 81 % et 79 % des sondés). Ils attendent aussi que les syndicats soient associés à la réflexion stratégique des entreprises (73 %) et que les compétences acquises dans l’exercice de leur mandat soient professionnellement valorisées (64 %). Et dans le même temps, ils appellent les syndicats à se montrer plus réalistes dans les négociations (43% des citations).

 

Inutile d’aller chercher ailleurs de nouveaux modèles pour répondre aux attentes des Français. Des exemples éprouvés existent en France, tant dans le secteur privé que public. Un exemple : s’inspirant d’AXA, la Ville de Suresnes a signé en 2009 une charte sur la reconnaissance du parcours syndical. Cette initiative unique à ce jour dans le secteur public lui a valu de remporter le prix Territoria récompensant la collectivité la plus innovante en matière de ressources humaines.

 

« Lucides et pragmatiques, les Français envoient un message d’espoir aux partenaires sociaux et aux pouvoirs publics. Ils invitent les décideurs à ne plus dissocier le social de l’économie et à accélérer très largement la dynamique engagée en matière de dialogue social au cours des dix dernières années », décode Gilles de Robien, président de Société en Mouvement.

 

Car les Français n’attendent qu’une chose : que le dialogue social prenne toute sa place dans les entreprises, au plus près du terrain. En ce qui concerne leurs conditions de travail (notamment le temps de travail), près de quatre sondés sur cinq (79 %) considèrent qu’elles doivent être déterminées par l’accord collectif à l’échelle de l’entreprise, primant ainsi la législation ou les accords nationaux.

 

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Gwenaelle Verpeaux

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gwenaelle.verpeaux@gmail.com

[1] Sondage réalisé les 14 et 15 janvier dernier auprès d’un échantillon de 1061 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.

[2] Club de réflexion apolitique fondé en 2006.